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Radiography
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Là et par Là , with Christiane Thomas

Ullysses, with Christiane Thomas

Installations

HENRY LEWIS: X-SPACES

We experience space thanks to our legs, we seize it thanks to our hands, but our eyes cannot see it. The reason is that eyes can only process rays which have been reflected by surfaces: we see surfaces only. But are there not X-rays which piece the surfaces and advance toward the inside of bodies? Should not X-ray pictures permit us to see spaces? This is the sort of question Lewis is facing.

This is a far-reaching and deep question (to apply space categories like “far” and “deep”). The fact that we experience and seize space, but cannot see it is very uncomfortable for a culture as addicted to vision as ours. The history of the west may indeed be understood to be a progressive attempt to imagine our space experience and our special concepts. As for space experience, phrases like projection of shadows, simple and multiple perspectives and other trompes l’oeil may be taken as attempts to visualize space within an image. With space concepts this progressive attempt becomes breathtaking: first, space is imagined as the “above” and “below” of a geographical plane (as “heaven” and “hell”), the Earth is imagined to be a body within an infinite space dome, and finally attempts are made to imagine space as curves with wrinkles (not to mention alternative “non-Euclidian” spaces). It cannot be said that those attempts at rendering space as imaginable have been very successful, especially since we have grasped and are beginning to experience that space cannot be imagined without reference to time.

Since X-rays were “discovered” (rendered visible), a method seems to have been found to look into space though surfaces. Curiously enough, however, interest tended to concentrate not on the space those rays traverse but on those surfaces behind the pierced surfaces which reflect X-rays (for instance, on the bones within the human body which are not pierced by X-rays), Lewis, however, does not approach X-ray pictures from the usual, but from an artistic view-point. He is not interested in looking behind the surfaces, but in visualizing his experience with space. Thus he becomes a pioneer in the progressive attempt to imagine space.

For this purpose he assembles specific contexts composed of materials to which X-rays relate in various ways; for instance, of lead foils which reflect them. And lead covered tissues which partially absorb them. Thus he acts as a sculptor and has an experience with space through his fingers and hands which is very close to the space experience in sculpture. But his sculpture are not meant to be seen be eyes, but by X-ray apparatuses. He transcodes his space experience into X-ray pictures. And he who contemplates those pictures is meant to be able to visualize the third dimension. The pictures are meant to be images of space.

This is fascinating for two reasons. First, because it shows a new attitude toward sculptures. If within our tradition a three-dimensional work is produced, it is meant to be looked at from various angles, to be touched, and to be stumbled against. But here a three-dimensional (although relatively flat) is being produced which is meant to permit space visualization within the surface of an image. The three-dimensional work is a pretext for the production of X-ray images. Now this poses aesthetic questions which have not been answered so for. For instance: is the creative pleasure in the production of such pretexts less than with the production of permanent “monuments” or is it possibly greater?

The other reason for the fascination emanating from Lewis’s pictures has to do with the difficulty in deciphering X-ray pictures. We know from experience that X-ray specialists are capable of seeing things which we do not see. But there the ting goes deeper. We tend to look at those pictures as if they were photos, and thus we decipher within them a space as it is programmed within the photo camera in the form of a perspective, as a deception. But this is not so: in those pictures there is no optical delusion, but there is space as “seen” in fact by X-rays. To render the thing even more difficult: Lewis’s originals (which are sometimes large) show his space experience much more clearly than do his diapositives (small slides), and when looking at those we can hardly distinguish between them and the optical delusions in photos. Now this is a fascinating problem because it questions if there is any epistemological sense in wanting to distinguish between delusion and non-delusion where vision is concerned.

Lewis’s experiments are aesthetically pleasurable, but they are much more interesting if taken to be problematic. They ask new kinds of questions, they pose new problems. It may be assumed that they are the initial phases of an entire future evolution. An evolution which, together with holography, may come to radically transform our space experience and concepts.

Vilém Flusser

 In European Photography N° 41, 1989

Les Champs Délicieux de Lewis et de Thomas

Dès le premier coup d’œil, les images d’Henry Lewis et de Christiane Thomas renvoient irrésistiblement a cette une qui fit l’unanimité de toute la presse d’on jour et qui montrait le premier homme en navigation dans l’espace. Tandis que les géomètres de l’infiniment grand s’inquiètent de percevoir le fameux « bout des choses » que Micromégas, venus de l’étoile nommée Sirius, n’a pas voulus dévoiler aux homes, leur laissant un « livre tout blanc » tous les soins de Lewis et de thomas paraissent bien davantage consacres a en déterminer l’origine.

La récente conjugaison de leurs démarches est tout à fait éclairent à ce sujet, d’autant quand l’on mesure la part respective de chacun d’eux en quête pour Christiane thomas d’un absolu de la forme au travers d’une déclination rigoureuse de modules structures, pour Henry Lewis d’un absolu de la matière dans le contexte d’une investigation radiographique pousse jusques aux confins de ses possibilités. La mise en œuvre plastique de leurs travaux procède de cette conjugaison pour établir un objet dont le statut ambigu confer à leurs images une paradoxale étrangeté : il y va tout à la fois du familier et de l’inconnu, de l’ordre et du chaos, du montré et du caché.

Certes, il y a belle lurette que la recherche scientifique nous a instruits de la possibilité de pénétrer ainsi les secrets microcosmiques de l’univers mais rares ont été les occasions dans l’histoire de la création artistique de lui porter la réplique. En ce domaine, les expériences de Man Ray avec ses Rayogrammes, celles de Lissitsky et de Maholy-Nagy aves leurs photogrammes ont été déterminantes et leurs références, ici, n’est pas innocente. Elles indiquent la direction de l’entreprise menée par Lewis et Thomas. 

Leurs images délivrent au regard la vision traversée d’une intemporalité, et de l’homme, et du monde, et semblent faire écho a ce que notait en 1917 l’artiste hongrois dans son poème Licht-Vision : « Espace, temps, matière, unis dans la lumière… La lumière, la lumière totale engendre l’homme total. » Par ailleurs, cette façon que Lewis et Thomas ont de constituer leurs travaux en opèrent toutes sortes de coups illuminées en plein cœur de la matière, puis en les agençant de façon stratigraphique les condit a une image finale qui comme Man Ray est « l’image di processus d’enregistrement de l’image » ; à son égal, ils appréhendent ainsi la photographie en abysse a l’intérieur d’un réseau de traces qui la définit a l’ordre d’une investigation de ses propres entrailles.

La notion de segment qui fonde l’originalité de cette œuvre binôme se retrouve dans ce qu’elle donne à voir d’une fragmentation en arc de cercle di champ de vision, elle-même redondante d’une définition de l’espace vu au travers d’in objectif a visée éventail. L’aspect du lucarne de la forme ainsi définie, tout comme le format réduit de la boite lumineuse dans laquelle elle se découpe, suggère nettement l’idée d’une focalisation et semble avoir été établi pour faire la part des choses entre la rumeur et la silence, le vivant et l’artificiel, la lumière et les ténèbres. Dans cette qualité-là d’approche, on serait tenté de dire que les « images primordiales » de Henry Lewis et Christiane Thomas sont dans la lignée de Champs délicieux jadis laboures par les Rayogrammes de Man Ray et célébra Tzara lors de leur première publication.

Philippe Piguet

Une Illustration de l’Odyssée

L’Odyssée nous conte le retour d’Ulysse de la Guerre de Troie (vers le XIIème siècle av. JC ?). L’histoire a volé de bouche en bouche jusqu’à Homère (VIIIème-VIIème siècle avant JC) que l’on retient comme auteur du poème dans sa forme actuelle. On sait qu’il fallut 10 ans au malheureux Ulysse pour retrouver son pays, son fils et sa femme. 10 ans que dura l’Odyssée, 10 ans d’une aventure où les enfantillages des Dieux prennent en otage la sagesse et l’humanité du héros. 10 ans de courage et d’opiniâtreté impuissante face au destin toujours contraire. 10 ans de condition humaine… et un texte fondateur pour les peuples d’Europe. Les photographies d’Henry Lewis et de Christiane Thomas illustrent l’Odyssée. La narration photographique est répétitive comme le sont les formules narratives du poème : “ils s’embarquèrent aussitôt et, assis en ordre sur les bancs, ils frappèrent de leurs rames la mer grise d’écume…” ou “quand parut l’aube aux doigts de rose”. La naïveté des tableaux centraux s’oppose à l’étrangeté raffinée et inquiétante des fonds radiographiques, qui témoignent de ce que l’histoire d’Ulysse est toute entière soumise au regard des Dieux. La toute petite scène où le héros humain déploie son courage n’est que le centre d’un vaste ensemble indifférent. De ce centre pourtant vient la lumière, vient l’espoir, vient l’action, vient la force brute d’une vie courageuse et pourtant dérisoire. Tout le message de l’Odyssée.

Henri Peyre